Un maire face aux vagues.

Alexandre Duyck

Sur fond de Covid­19, la première année des édiles nouvellement élus en mars 2020 a été agitée.
A Nesles-la­-Vallée, dans le Val­ d’Oise, Christophe Buatois, 56 ans, a pu mesurer l’intensité de la crise.


Magazine : Le Monde

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Photos : Julien Muguet
Parution : 2021


Extrait

C’était il y a un an, à deux jours d’intervalle, deux de ces événements qui comptent dans une vie. L’un mondial et collectif : l’explosion de la pandé­ mie, suivie du confinement et de l’annonce, le vendredi 13 mars, de la fermeture du lycée qu’il dirige à Cergy­ Pontoise (Val­d’Oise): 1250 élèves, 150 personnels, l’improvisation, l’invention d’une scolarité à distance... L’autre événement, local et beaucoup plus personnel, a lieu quarante­ huit heures plus tard: son élection triomphale à la mairie de Nesles­ la ­Vallée, au premier tour, avec 72 % des voix. Dire que ces deux jours et les douze mois suivants n’ont pas été de tout repos pour Christophe Buatois relève de l’euphé­ misme : « Je savais que j’allais y consacrer du temps. Mais c’était au­delà de tout ce que j’aurais pu imaginer. »

Nesles ­la­ Vallée, donc. Un charmant village à 45 km au nord ­ouest de Paris, 1800 habi­tants, des commerces, une école, un bureau de poste, une maison de santé, le tout en plein Vexin: belles forêts, longues lignes droites appréciées des cyclistes, élégantes maisons aux toits pentus ornés de petites tuiles... Au premier tour de la présidentielle de 2017, François Fillon y était arrivé en tête. Deux ans et demi plus tard, à l’automne 2019, Philippe Guéroult, maire depuis 1995, annonce qu’il ne se représente pas. Les re­gards se tournent alors vers son adjoint aux finances, Christophe Buatois. « Bien sûr que, dans mon esprit, c’était lui, confie Philippe Guéroult, aux allures de Jacques Chirac. Pour sa capacité à commander, le travail de chien accompli dans les lycées. Et sa capacité à veiller sur les finances de la commune. »

Mi­mars 2020, le proviseur Christophe Bua­tois devient maire (sans étiquette) de Nesles. Enfin, pas tout à fait. Première conséquence de la crise sanitaire : les conseils municipaux ayant l’interdiction de se réunir, il ne peut entrer en fonctions. Pendant deux mois, il va demeurer dans un entre­deux : vainqueur, mais pas élu. Le duo Guéroult­ Buatois entame la tournée des commerçants et des villageois. Il faut grimper au grenier de la mairie, où dorment un millier de vieux masques, achetés du temps de l’épidémie A (H1N1) et toujours utilisables. « On les a don­ nés en priorité aux commerçants pour qu’ils puissent continuer à travailler, dit Christophe Buatois. Les gens étaient plus qu’angoissés, rien n’avait été prévu. Les autorités elles­ mê­mes ne savaient pas ce qu’il fallait faire. »