Nicolas mathieu : ses chemins d’écrivain pour "être là".

Alexandre Duyck

L’auteur vosgien revient sur la lente maturation, lui qui a toujours écrit mais n’a publié qu’en 2014 son premier roman. Trois œuvres (toutes multiprimées) plus tard, il ponctue ses phrases de “peut-être” mais avance sûrement, avec la nécessité absolue de faire corps avec ses mots pour accéder aux vérités et à l’humanité du monde. Rencontre gare de l’Est, en attendant son train pour Nancy.


Magazine : Marie-Claire

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Photos : Vincent Ferrané
Parution : 2022


Extrait

Il est là, dans un hôtel modeux, un peu tris- toune, entre la gare de l’Est et la gare du Nord à Paris. La gare de l’Est par laquelle il est arrivé en venant de chez lui, Nancy. La gare du Nord d’où il prend un autre train pour Calais, où il va rencontrer des lecteurrices. Nicolas Mathieu, prix Goncourt 2018 pour Leurs enfants après eux (plus de 610 000 exemplaires toutes éditions confondues et les droits cédés dans vingt et un pays) triomphe à nouveau avec Connemara, son nouveau roman, également paru chez Actes Sud. Publié en février dernier, le livre s’est déjà vendu à plus de 180 000 exemplaires. L’accueil médiatique a été exceptionnel. « Je n’ai jamais vu un lancement pareil », assure son éditeur, Manuel Tricoteaux. Le livre sera prochainement adapté au cinéma par Alex Lutz.

Cela semble incroyable mais Connemara n’est que le troisième roman de Nicolas Mathieu. Le succès, la notoriété ont fondu sur lui avec la fureur d’une avalanche. Pour l’ancienne ministre de la Culture Françoise Nyssen, présidente du directoire d’Actes Sud, il demeure pourtant « un gentleman, un écrivain du sensible avec une sensibilité qu’on pourrait qualifier presque de “féminine”. Il entend, il comprend, il est drôle et attentionné, il est humainement présent et attentif à l’autre, ce qui est très rare dans ce monde fou ». Une affaire d’éducation, de valeur, de construction. « Je n’étais pas angoissé par l’obtention du Goncourt, le risque qu’il prenne la grosse tête, se sou- vient son éditeur. Un signe qui ne trompe pas : il était lui- même inquiet pour le livre d’après. » Un verre d’eau à la main, Nicolas Mathieu sourit : « Je lis Céline, Proust, Colette... Vous avez vu les œuvres, leur dimension ? Je
sais que je ne ferai jamais quelque chose d’aussi grand. »